PIB, Croissance, quelle croissance ? Notre société de consommation qui vise à augmenter sans cesse le PIB ne s’est elle pas trompée d’indicateur ?

, par Gilbert Fernandes

Une personne ignorante du bon fonctionnement d’une voiture, et qui, pour la piloter ne se contenterait de regarder qu’une partie des indicateurs risquerait d’endommager le moteur, voir de le détruire, simplement en commettant une erreur de conduite "logique", mais basée sur des indicateurs incomplet. Ne courrons nous pas les mêmes risques avec notre économie, et notre mode de vie, en ne basant le pilotage de notre économie uniquement sur un indicateur nommé le Produit Intérieur Brut ?

Prenons l’exemple d’un conducteur néophyte, qui ne connaitrait rien à l’automobile, sinon les très grandes lignes tel que tourner le volant et appuyer sur l’accélérateur.
Quand il découvre le compte tour sur son tableau de bord, il fait vite la relation entre appuyer sur l’accélérateur et la petite aiguille du compte tour qui monte. Et donc plus l’aiguille monte, plus il va vite, meilleur c’est.
Notre pilote novice continue ses observations, et voit l’aiguille de température. Celle-ci se met à monter elle aussi, mais avec un peu de retard. Notre pilote en conclue donc que la monté de température et une conséquence de l’augmentation de vitesse, et donc de la valeur indiquée par le compte tour. Cette augmentation de température semble bonne et souhaitable car elle indique que tout marche bien, que la voiture avance vite, et qu’en plus il peut avoir du chauffage dans l’habitacle.

Notre conducteur avance tranquillement et décide d’accélérer un peu. Il appuie sur le champignon et le compte tour grimpe doucement : 2000 tours/min, 3000, 3500, 4000. L’aiguille de température ne monte que faiblement. Souhaitant la faire monter à son tour (car il fait très froid dehors), il décide d’appuyer à fond sur l’accélérateur car comme il y a un lien de cause à effet, ... cela devrait marcher. Le compte tour grimpe en flèche, le moteur se met à hurler, et l’aiguille de température monte doucement, 85°, 90°, 95°. A 100°, le conducteur se réjouit, car grâce à "ses efforts", il a pu gagner 15% de température (et donc son habitacle est mieux chauffé !). Il pense alors qu’il peut surement faire mieux, en "continuant", voir en "accélérant". Mais que va-t-il se passer ? Après avoir dépassé les 100° (peut-être même avec joie), différents voyants d’alerte vont s’afficher juste avant que ... le joint de culasse de cède, le moteur "explose", et au mieux il se retrouvera en panne, à l’arrêt au bord de la route. Au pire, il partira dans le décor, et lui sera blessé, voir pire.

Pourquoi la lecture du compte tour ne suffit pas ?

Pourquoi ce seul indicateur, certes appréciable ne suffit pas à bien piloter une voiture ? Parce qu’il ne dit pas tout.
Cet indicateur indique le nombre de tours effectif du moteur, mais pas le nombre de tours optimal ! Quand une zone rouge est indiquée sur le compteur, elle est souvent très au dessus du raisonnable. Il faut donc utiliser également utiliser ses oreilles pour écouter le ronron du moteur, parfois son nez (odeurs bizarres dans la ventilation), et surtout regarder les autres indicateurs, tel que ... le compteur de vitesse. Et se poser la question de "pourquoi la vitesse est si basse, alors que le compte tour est aussi haut ?".

Cela amène le conducteur à regarder un peu plus loin que le volant et découvrir une étrange manette : le levier de vitesse !

En acceptant de lâcher une main du volant, le conducteur va pouvoir changer de vitesse et ainsi augmenter la vitesse de son véhicule (ce qui est le but), tout en voyant s’effondrer l’aiguille du compte tour. Dans le même ordre d’idée, en ne regardant que le compte tour de la voiture, on peut avoir l’impression de ralentir fortement lorsque l’on monte une vitesse, et d’accélérer fortement lorsque l’on rétrograde d’une vitesse. Le compte tour est un bon indicateur de vitesse, mais il n’indique pas tout. Et si l’on veut être "durable" il faut garder son aiguille dans une tranche de valeur raisonnable ( 2 à 3000 tours en moyenne).

Le PIB : compte tour de notre économie

Le PIB est un peu le compte tour de notre économie : plus il est haut, plus l’économie tourne vite (plus il y a d’échanges entre les gens. Cela ne veut pas dire pour autant que tout le monde s’enrichit, ou que tout le monde mange à sa faim, ou que tout le monde est heureux, voir plus heureux que lorsque le PIB était plus bas !. Nous pourrions même imaginer un pays sans TVA (le rêve !) où le PIB pourrait monter à l’infini simplement en demandant à 2 de ses citoyens de s’acheter puis de se revendre, toujours au même prix, le même article, et cela les centaines de fois par jour, voir plus. Le PIB serait alors égale au nombre totale de transactions multipliées par le prix de vente. Nous pourrions avoir un PIB énorme, mais sans un centime dans les caisses de l’état et peut être rien à manger pour ses habitants.
Il est vrai que dans nos pays, avec notre économie "normale", lorsque le PIB est important, cela est un indice que l’argent circule, donc que les citoyens consomment et au un niveau d’accès moyen aux biens produits par les entreprises. Bon, mais il y a tout de même des limites : les limites de production de la planète : impossible d’acheter plus de poissons qu’il n’y en a dans la mer, de couper plus de bois qu’il n’y en a dans les forêts, etc... C’est comme pour notre moteur : impossible de monter le compte tour à 10.000 tours, ou de lui faire faire 3 fois le tour du cadrant. En théorie (juste en regardant le cadran) oui, mais en pratique, cet écran n’est que la conséquence de ce qui se passe dans le moteur, et qui lui a des limitations physiques ! comme notre planète : elle n’est pas infinie, ses ressources ne sont pas inépuisables !

De plus, il y a des conséquences (la monté de température), qui peuvent être anecdotiques, mais qui sont de vrais témoins d’alerte du problème en court. Plus nous consommons, plus nous émettons de pollution (dont le CO2), et plus la stabilité de notre climat se dérègle. Les scientifiques ne cessent de nous sortir de nouvelles études montrant l’accélération du dérèglement climatique et des conséquences dramatique que nous aurons à subir dans les prochaines décennies. Certes nous pouvons (essayer) d’augmenter moins vite la pollution que la croissance économique (les pays Européens polluant moins en volume que les pays émergeant pour le même PIB), mais en pratique, à chaque fois que le PIB augmente, la pollution sur Terre augmente en volume. Or nous sommes déjà 2 fois trop haut (et peut-être un jour 3 fois !!).

Les économistes (et les politiques) nous disent "pour créer de l’emploie il faut 3% de croissance de PIB". Mais combien de croissance de la pollution ? combien d’épuisement des ressources ? 3% voir plus ?

A quoi sert-il d’avoir un travail si vous n’avez rien à manger ? Ne vaut-il pas mieux avoir à manger même si vous n’avez pas de travail ?
Le culte du PIB roi n’est il pas en train de nous faire mettre le feu à notre maison, simplement parce que cela nous réchauffe durant quelques heures ? Et ensuite que ferons nous pour passer la fin de l’hiver ?