Le prix de l’énergie (pétrole, gaz, électricité et autres) va-t-il monter ? Le prix du pétrole va-t-il remonter à 100 $ le baril, voir plus, et le prix de l’électricité, va-t-il monter lui aussi ?

, par Gilbert Fernandes

Dans un contexte de crise économique où la consommation mondiale de pétrole diminue de mois en mois, où le prix du pétrole semble continuer de plonger sans limite basse, cette question peut paraitre saugrenue, voir stupide.
Mais en regardant à plus long terme (quelques années voir quelques décennies), la réponse positive semble évidente.

Le pétrole

Dans un marché capitaliste où le prix des produits est fixés par le rapport entre l’offre et la demande, la hausse rapide entre 2005 et 2008 du prix du baril de pétrole s’explique très facilement par une demande forte que les producteurs n’arrivaient pas à fournir.

Conso mondiale pétrole 2008
Courbe mensuelle de production et de consommation de pétrole jusqu’à fin 2008

En juillet 2008 la tendance s’est inversée brusquement car la demande a soudain chutée, et les producteurs n’arrivaient plus à trouver de clients pour leur produit (Voir l’article parru sur l’Express : Pourquoi les prix du pétrole se sont effondrés ?). La chute a été d’autant plus rapide que les producteurs de pétrole avaient tous poussés leur production à fond.
(Voir l’article sur le site Oil Drum). Donc dès que la consommation mondiale va redémarrée (avec la fin de la crise économique causée par le pétrole cher), la demande va repartir vers le haut et donc les producteurs vont se trouver en position de force : les prix vont partir à la hausse (Voir l’article dans l’Express : Pourquoi les prix du pétrole vont remonter). Même l’AIE prévois que les prix du baril vont remonter au delà de 100$.

Article dans l’Expension : Les cours du pétrole sont sans doute retombé trop bas

Depuis plusieurs années, de nombreux acteurs dans le pétrole (Total, Shell, l’ASPO, ...) annoncent officiellement que la production mondiale de pétrole va plafonner puis baisser chaque année, et cela d’ici peut de temps. Cela veut dire que face à une demande en croissance, voir stagnante, l’offre va mécaniquement devenir plus faible que la demande, et donc, les prix vont monter. C’est ce qui s’est passé entre 2005 et 2008, et cela va recommencer. Or le prix du pétrole sert d’indice de base au prix du gaz et même du charbon. Si le pétrole monte, le gaz et le charbon feront de même.

La baisse actuelle de la consommation est-elle une chance ?

En consommant moins depuis 8 mois, va-t-on avoir du pétrole pendant plus longtemps ? le pic est-il repoussé ? Un rapide calcul de coin de table montre que l’économie réalisée sur 1 ans avec 10% de baisse de la consommation (exemple théorique), ne revient qu’à "économiser" 1 mois de consommation de pétrole. Cela ne change au final pas grand chose. Quand au nouveaux "super gisements" découverts au large du Vénézuéla et du Brésil, de 1 à 3 milliards de barils (et qui ne seront pas mis en production avant des années), ils ne représentent que 1 à 2 mois de notre consommation actuelle (80 à 85 millions de barils par jour !). Seul le gisement (potentiel) en artic de 100 milliards de barils commence à être un peu significatif ( 5% des réserves mondiales de pétrole), et représenterait en gros 3 ans de notre consommation actuelle. Cela ne change donc pas les données du problème et ne rallonge pas notre espérance de consommateur, car même si ces gisement représentent beaucoup d’argent pour ceux qui les exploiteront ( plusieurs centaines de milliards de dollards), leur mise en exploitation sera très longue, ils ne délivreront que peut de pétrole par an (au vus de la consommation actuelle), ce pétrole sera très cher (de l’ordre de 100 $ le baril), et cela ne compensera pas la baisse de production des autres champs pétrolier.

De plus, la baisse actuelle des cours du pétrole (sous les 40 $), a eu pour effet directe de stopper tous les investissements de pétroliers. Du coup, la mise en chantier de nouveaux gisement est stoppée (ou presque), ce qui provoquera, d’ici quelques années, une baisse de la production encore plus rapide, car la baisse des principaux champs pétrolier ne sera pas compensée (partiellement) par des nouveaux champs. C’est le paradoxe : la baisse de la consommation aujourd’hui risque de provoquer une baisse de la production encore plus forte dans les années à venir !

Et le gaz ?

Des analystes prévoient même que la production mondiale de gaz va culminer puis baisser vers 2020. Ce qui veut dire que des tensions vont apparaitre peut-être avant ce délai, et les prix du gaz augmenter encore plus vite. Une personne bien informée sur le sujet m’a même dit que les russes pensaient avoir de gros problèmes dès 2012 pour alimenter en gaz leurs clients (l’Europe) et leur marché intérieur : leur production ne suivrait pas (manque d’investissement, épuisement des gisements). Combien de gaz vont-ils nous livrer alors ? à quel prix ?
Lorsque l’on voit leur facilité à couper le gaz, l’hiver à l’Europe (via l’Ukraine), et les conséquences pour certains pays (plus de chauffage, plus d’industrie !) Cela laisse à réfléchir ! Certes, la France est peu dépendante du gaz russe ( 15 à 20% des importations), mais pour d’autres pays d’Europe, cela peut représenter 80 à 100% de leur approvisionnement. Les laisserons nous mourir de froid sans leur vendre un peu de notre gaz ?

Et l’électricité ?

Des tensions vont se faire également sentir sur l’électricité, sur son prix et sa disponibilité. Car plusieurs pays ont construit et construisent de nombreuses centrales électrique au gaz (moins polluant que le charbon, et plus rapide à démarrer). Cela permet de contre-balancer les arrêts des éoliennes en période de manque de vent. Mais que ce passera-t-il en Europe en cas de pénurie de gaz naturel (pas en cas d’absence totale, mais juste une réduction de 20 ou 30% de l’offre). Ces centrales électrique, grosses consommatrices de gaz pourront-elle tourner ? Aura-t-on suffisamment de capacité de production avec des centrales au charbon ou nucléaire pour alimenter l’Europe qui consommera mécaniquement plus d’électricité (pour compenser une partie du gaz) ? (Remarque : les barrages hydrauliques ne pourront pas compenser longtemps, car un barrage qui tournerait en continu et à fond, se viderait en quelques semaines, et ensuite il faut attendre 1 an pour qu’il se re-remplisse). Tout le réseau électrique européen étant inter-connecté, le risque c’est la panne générale de courant, ou au minimum des délestages en série, si la production faibli.

Aucun doute que le prix du courant montera aussi, pour répondre à l’augmentation du prix des matière premières des industriels produisant l’électricité (charbon, gaz), et la hausse de la demande.

Conclusion

Donc si nous voulons pouvoir conserver un minimum de confort sans nous ruiner totalement, il va falloir apprendre à consommer moins en volume, pour que le prix dépensé reste à peut près identique. Pour cela il y a 2 solutions :
 investir pour réduire les dépenses inutiles (isolation, amélioration des rendements des systèmes de chauffage, moyens de transport moins énergivore, ...)
 consommer moins, réduire nos envies, nos "besoins" qui ne sont pas vitaux.
Le temps est compté, nous avons peut-être encore 3 à 5 ans pour agir, ensuite il faudra cumuler les difficultés.

Dans un monde fini, aux ressources naturelles limités (et quelle que soit la hauteur de cette limite), la consommation de ressources non renouvelables est forcément limité ! Or nous avons atteins cette limite, non pas qu’il ne va plus rien avoir, mais que les ressources disponible chaque année vont bientôt diminuer d’année en année. La loi de l’offre et de la demande va donc mécaniquement faire monter leur prix (et ainsi ramener la demande au niveau de l’offre). Il nous faut donc apprendre à consommer moins (d’énergie) pour avoir autant (d’argent dans le porte monnaie).