Prix du pétrole, état des réserves et manipulations ... La prochaine crise économique est-elle pour bientôt ?
Trois ans après la dernière crise économique, les états riches essaient encore péniblement de penser les plaies budgétaires et économiques (chômage, ...). Les mêmes causes provoquant les mêmes effets, nous pouvons nous demander si la prochaine crise sera pour bientôt, l’année prochaine ? pour Noël ? ou carrément ... maintenant !
Le prix du baril frôle à nouveau la barre des 100 $ le baril, alors qu’il y a seulement deux ans et demi, il était à 30 $. Il faut dire qu’en 6 mois seulement (en juillet 2009), malgré une crise économique mondiale, il était remonté à 70 $ et il n’est plus redescendu.
Dans un marché mondial sous le régime "libéral", le prix est fixé par un équilibre entre "l’offre et la demande". Quand la demande augmente plus vite que la possibilité de l’offre le prix monte (seul les riches réussissent à acheter, les pauvres repartent bredouilles). Si la demande s’effondre (lors d’une crise économique, comme en août 2008), le prix s’effondre lui aussi.
Or le prix du pétrole a beau monter depuis 2 ans, la production mondiale ne monte pas. Le prix du baril double, mais la production reste stable. Pourquoi ? tout simplement parce que la production de pétrole est limité par des contraintes physiques : quand un derrick crache le maximum, on peut bien doubler le prix du baril, il ne crachera pas deux fois plus de pétrole. Ensuite le forage de nouveaux puits prend du temps. Même milliardaires, les rois du pétroles n’arrivent plus à creuser de nouveaux puits plus vite que la baisse de production de leurs "vieux puits". Forer et mettre en exploitation de nouveaux gisements prend du temps, beaucoup de temps (plus d’une dizaine d’année), cela ne se fait pas en 3 mois, ni même en 1 an.

Voir l’article en anglais sur OilDrum
Aucun pays de l’OPEP n’a réussit à compenser l’arrêt de production de la Libye ces derniers mois. Pourtant le prix du baril ne fait que monter. Et à 100 $ le baril, tous les producteurs font un maximum de bénéfice ( 5 $ de cout de production en Arabie Saoudite, 1 à 2 $ en Irak, 20 $ en Russie même à 60 $ le baril de shiste bitumineux au Canada, la marge bénéficiaire est confortable : 40 millions de dollars de bénéfice net par jour pour 1 million de barils produits (par jour).
Personne n’a envie de se faire de l’argent ? NON ! Personne n’arrive à produire plus !!! tout simplement.

Données issue de Boursorama
Regardez la rapide remonté du cours du baril en 2009, et le petit "saut d’humeur" en début d’année 2011, lors de la révolution en Libye. Un petit coup de spéculation peut etre (belle chute de 20$ 2 mois plus tard), mais le prix de base continue sa lente monté depuis 1 ans (début de la reprise, en Asie surtout !).
Baisses dans les pays riches
Depuis 5 ans, la consommation de pétrole diminue dans les pays Européens et les États-Unis. Nous avons environ 5% de baisse sur 5 ans. C’est une bonne chose cela réduit la pression sur la production et pourrait amener à réduire le prix d’achat du baril. Mais, car il y a un mais, dans la même période :
– La production de pétrole dans la mer du Nord (plus gros gisement "Européen" baisse de 6% par an (donc tous les ans) depuis 5 ans.
– La production de pétrole aux États-Unis continue de diminuer malgré les efforts pour produire plus et plus loin (golf du Mexique, Alaska)
– la Chine et l’Inde (ainsi que d’autres pays émergeant) voient leur consommation augmenter plus vite que la consommation des pays riche diminue (la Chine consomme aujourd’hui la moitié de ce que consomme les USA et augmente de 6% par an).
Du coup, la pression sur les producteurs augmente, et les prix aussi.
Sans parler des producteurs qui consomment aussi de plus en plus de leur propre pétrole, et donc, ... en exportent de moins en moins.
Des signes inquiétants
Les princes et rois d’Arabie-Saoudites ont eu des déclarations étranges ces derniers temps. Quand on sait que l’Arabie-Saoudite est le plus gros pays pétrolier (25% des réserves mondiales de pétrole "officielles", le plus gros producteur, environ 10 % de la production mondiale quotidienne, et le plus gros exportateur mondial), cela fait réfléchir.
– l’an dernier, le roi Abdalla d’Arabie Saoudite déclarait que l’Arabie Saoudite allait arrêter la prospection et le développement de nouveaux champs de pétrole, afin de garder des réserves pour ses propres populations, pour les années futurs (Voir ce billet sur un blog)
– puis en juin de cette année, il y a cette déclaration comme quoi l’Arabie Saoudite serait capable de produire 4 millions de barils/jours presque instantanément si l’Iran venait à faire défaut (voir la news). A se demander si les saoudiens n’aimeraient pas voir se faire bombarder leur voisin. Remarquez que malgré ces déclarations, ils n’ont pas réussit (ou voulu ?) compenser la baisse de production de la Lybie en ce début d’année (1,7 millions de barils / jour).
– Et puis les Saoudiens toujours qui déclarent vouloir ouvrir toutes grandes les vannes du pétrole pour faire chuter le prix et couler économiquement leur voisin (l’Iran toujours ; je n’ai pas retrouvé l’article sur le net). L’OCDE qui déclare vouloir soutenir la croissance mondiale en vidant une partie de leur stock de réserve (60 millions de barils, soit 18h de la consommation mondiale), pour faire baisser le prix du baril. Résultat des courses : malgré tous ces efforts le prix du pétrole ne fait que monter. L’offre ne suffit plus à étancher la demande !
– Et puis l’Arabie Saoudite qui n’arrive plus à compter ses puits de pétrole. Des petits malins se sont amusés sur Google Earth à compter les puits dans les gros gisements de pétrole et à les comparer au nombre de puits "officiellement déclarés par le pays". Surprise ! il y a plus de puits sur les photos que sur le papier ! Pourquoi ? les producteurs auraient ils du mal à tenir la cadence ? les puits existant s’épuiseraient-ils plus vite que prévue ? Faudrait il forer sans cesse et de plus en plus vite pour compenser les pertes ? D’ailleurs pourquoi le royaume a déclarer vouloir augmenter son nombre de puits de 30% ? quel est le problème chez eux ?
– Au niveau des consommateur, deux organismes ayant pour mission de prévoir les évolutions du marché (capacité de production, prix ...) qui sont l’AIE et l’EAI donnent également des signes subliminaux intéressants :

Depuis plus de 15 ans, les prévisions de capacité de production mondiales sont revues à la baisse. De franchement croissantes, elles sont aujourd’hui tout juste en croissance (il faut bien que le PIB mondiale augmente : c’est notre joie et notre but).

Mais l’AIE est même encore plus subtile quand elle dit que dès 2011 il faut développer des champs existants pour ne pas perdre en production et dès 2015 il faut découvrir et mettre en production de nouveaux gisements inconnus pour produire autant en 2035 que ne le fait l’Arabie Saoudite aujourd’hui. Quand on sait qu’il faut 10 à 15 ans pour mettre en production un gisement et peut être le double pour atteindre sa pleine capacité, que depuis les années 1970 le seul grand gisement découvert est celui de la mer du Nord (dont la production diminue depuis 5 ans et dont la capacité est très inférieure à celle de l’Arabie Saoudite), il devient claire que tout ceci est carrément impossible pour de simples problèmes physiques.
Des annonces officielles au plus haut niveau
Quelques officiels commencent à le dire haut, mais pas trop fort (difficile à vendre juste avant des élections). Que ce soit le premier ministre Mr Fillon : la production de pétrole « ne peut que décroître »
Ou le Pentagone américain (Peak Oil : pourquoi le Pentagone est pessimiste) qui dit carrément qu’en 2015 il pourrait nous manquer l’équivalent de la production de l’Arabie Saoudite au niveau mondiale (à recouper avec les graphiques rigolos de l’AIE). Mais cette alerte n’est pas la seule aux USA, il y en a eu à différents niveaux. A voir également les mouvements de personnels entre l’AIE et le Département de l’Energie.
Il y a eu également un colloque (en France) à l’Assemblée nationale qui rassemblait une centaine de personnes (dont 7 parlementaires, pas plus), et dont la vidéo est disponible sur le net. Lors de ce colloque, l’épuisement des réserves et la baisse de production a clairement été discutée.
La baisse de production imminente du pétrole n’est plus un scoop à très haut niveau. Elle n’est même plus discutée ou débattu : tout le monde commence à le dire haut et fort (sauf les médias qui ont du mal à faire suivre). Reste que cet événement historique aurait dû être anticipé par les politiques et les industriels ( d’où le livre "3 ans pour sauver le monde" publié en janvier 2009). Maintenant il va falloir agir !
Les conséquences
Quelles conséquences pour nous ? peut-être une nouvelle crise économique comme semble l’indiquer la chute de la bourse en ce début du mois d’Aout ? C’est ce qu’annonçait Jancovici dans différents articles et livres.

Graphique issus de l’article Prix futur du pétrole
Mais il n’est pas le seul, de nombreux chercheurs (voici un exemple) ont mis en corrélation le prix du pétrole, sa production, et les crises économiques (article de David Murphy).
Si la chute de la bourse (et du cours du pétrole) se poursuivent ce mois ci, alors ce sera le signe que nous entrons dans une nouvelle crise (moins de 2 ans après la dernière), après un pic du prix du pétrole de "seulement" 120 $ le baril (contre 145 $ en Juillet 2008). Ce "petit pic" aura suffit à amorcer la bombe de la dette, largement gonflée par la dernière crise bancaire, crise bancaire elle même amorcée par la hausse du prix du pétrole qui avait tellement crevé le budget des ménages américains, qu’ils n’arrivaient plus à rembourser leurs crédits immobilier.
Cette crise devrait donc durer quelques mois à quelques années, avant une nouvelle embellie économique qui entrainera immanquablement, au bout de quelques mois une demande de pétrole supérieure à l’offre ... et donc une nouvelle crise.
Que faire ?
Et bien tout simplement ce que prônaient quelques écolos fous pour sauver le monde : réduire notre consommation d’énergie (gaz, pétrole, charbon et même électricité), même si à l’époque c’était pour réduire l’effet de serre et sauver le climat.
En décarbonnant notre économie (en réduisant sa consommation énergétique) nous pouvons obtenir une courbe de demande de pétrole (et de gaz, et de charbon et ...) qui descend plus vite (ou au moins aussi vite) que celle de production : et donc garantir que le prix d’achat du pétrole sera "stable et pas trop cher".
Nous pouvons attendre des actions fortes et énergiques de notre gouvernement (ce qui risque d’être long), ou décider d’agir personnellement, je dirai même égoïstement, pour l’intérêt de notre famille, de notre entreprise. Au final, nous y gagnerons, et le monde entier y gagnera.